Et petit à petit…

Hier, c’était dimanche. Hier, c’était le premier janvier.
Levé généreusement vers 9 heures trente, j’ai fait mon dernier petit déjeuner généreux de l’hiver. C’est normal, pour un dimanche. Depuis ce matin, c’est retour à la case « léger ». Je suis aidé en cela par un temps radouci et un ciel extrèmement lumineux, quelle chance. Sentiment de bien commencer l’année. L’an dernier me semble lointain, très lointain, du temps d’avant le champagne de ma quarantaine et de mon blog, des voeux envoyés après minuit. De la brume alcoolisée agréablement, de la fenètre grande ouverte pour chasser les vilains esprits qui pouvaient encore se loger chez moi et accueillir ceux, favorables, de la nouvelle année, au son de la petite chochette japonaise suspendue à ma fenètre, ding…, ding…
Donc, pour le premier janvier, début du « grand ménage ». Les Japonais le réservent aux derniers jours de l’année, mais je pense que dans mon cas, cela eut fait un peu désordre. Commencer son déménagement de février à la fin de décembre, quelle idée absurde! Hier, me plonger dans cette poussière de derrière ces revues, ces livres a été comme une manifestation de la bienveillance de cette nouvelle année. C’était comme un bain de jouvence alors qu’en commençant avant, j’aurais été nostalgique, rivé au passé. Hier, plus j’avançais et plus je prenais conscience du temps, de mon histoire que ces objets, bien maladroitement, continuent de raconter. L’autre Journal (magazine littéraire dirigé par Michel Butel), 1ère mouture de 1986 : Duras/Mitterrand, l’interview. Les 12 premiers numéros. L’autre Journal, 2ème mouture de 1990, des pavés de 400 pages qui racontent le monde juste après la chute du mur. Un testament littéraire de cette France Mittérandienne morte dans les sables de la 1ère guerre du Golfe. De sa force, de son esprit ouvert, cosmopolite, intelligent et ludique à la fois, grave mais lucide. Le plus beau magazine que la France ait jamais connu. Après, de toute façon, tout s’est cassé la gueule. Il y a eu la guerre, Rocard est parti, Cresson est passée avant Bérégovoy, Mitterrand a vieilli d’un coup, on a parlé du sang contaminé, des fausses factures. Fin de règne à tous les étages, Balladur et la récession. En 89, nous avions vu le monde nous regarder, Goude faire avancer Jessie Norman sur les Champs Elysées, on faisait 5% de croissance et notre président était l’homme politique le plus populaire de la planète avec Gorbatchev. En 1992, le premier, il mettait fin aux essais nucléaires. L’Autre journal, version 1990, c’était le magazine de cette transformation fulgurante de la France, tournée vers l’avenir. Chirac est passé et Mitterrand est mort. L’Autre journal a fait faillite en 1992 après une hypothétique nouvelle formule. Mais les gens de ma génération étaient fatigués.
Les Inrockuptibles, magazine beau et moderne des années 80 est alors devenu hebdomadaire et s’est pris de pasison pour la chose publique. C’est devenu un truc ronchon comme les anciens jeunes que nous sommes. Aucune énergie, « toutes des concierges », disait Léo Ferré.
J’ai revu, mais n’y ait pas touché, tous ces livres de littérature du XVIIIème siècle. Les romans, le théatre, les essais. J’ai aperçu mes livres d’ethnographie, de sociologie. Mes livres d’histoire du droit, mes livres d’histoire. Et puis mes romans japonais, mes livres sur le Japon.
Allez, oust, du vent, du balai… ! Ca ne va pas être facile, se séparer de tout cela. Mais il n’y a qu’à les racheter ou les emprunter en bibliothèque, où est donc le problème ? Ces livres me ramènent à Télégraphe essentiellement. A la très belle lumière de cet appartement du 20ème appartement. Petit, mais sympa. Les fêtes avec Julien, le marché le dimanche matin… Ma pièce de théatre… Qu’est ce que je lisais, à cette époque ! Qu’est ce que j’écrivais !
J’ai laissé le déblayage de tous ces bouquins à plus tard, peut être ce week end, tiens! J’ai un acquéreur pour ampli/enceintes etc…
A mon départ, il ne restera que du concentré de moi même, et notamment mes archives. Mes années de journal. Mes tentatives de roman, de théatre. Mes dessins. Spont’ex (à scanner d’urgence). Le reste est il si important ???? C’est une mue, quand on quitte sa vieille peau. Je mue.
Je vais emporter la chose la plus importante qui soit à mes yeux. Moi-même. Mes désirs, ma culture, mon histoire. Mes rêves. Mon virus. Mes goûts, mes projets. Mes ambitions. Mon réalisme. Ma persévérance. Moi, quoi !
Pour le moment je suis au travail, le ciel est toujours très bleu, lumineux.
Une bouteille de champagne me sépare de 2005. On me l’avait offerte pour mes 40 ans. Un Shell Flat seat me sépare de Tôkyô. Ca, je me le suis payé. Etre entièrement au Japon, c’est le plus beau cadeau que je puisse offrir à mon futur à venir.
De Paris,
Suppaiku


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