(samedi, pluie sur Ginza vers 18 heures ou Les parapluies de Ginza)
Matinée ensoleillée. Fond sonore, France-Culture, Les chemins de la connaissance. C’est étrange… Plus j’avance dans mon séjour ici (plus de 3 mois désormais), plus je me rends compte à quel point je suis à ma place ET professionellement, ET géographiquement. Professionellement, imaginez ! Je suis enseignant, j’ai moins de 27 heures de travail (en fait, 34 de 40 minutes, un total hebdomadaire dans l’école de 26 heures 20 hebdo !) réparties essentiellement sur 3 jours (du vendredi au dimanche) et deux demi-journées. C’est violent psychologiquement, mais c’est très peu en temps ! Je vis au Japon, à Tôkyô. Mon temps libre et les décallages horaires me permettent, enfin, d’écouter France-Culture. Vous vous rendez compte ? Quel changement… J’ai encore du mal à m’y faire, pour tout vous dire.
(avez vous vu Café Lumière, le film de Hou Hsou Sien, réalisé en 2004 et commandé par la société Shôchiku, 松竹 en hommage à Ôzu Yasujirô pour le 100ème anniversaire de sa naissance ? Le film tourne autours de la Yamanote et du fantastique réseau ferrovière Tôkyôïte comme si c’était autours de lui que s’organisait la vie, le monde, l’harmonie – c’est d’ailleurs presque la théorie exposée par Asano Tadanobu, 浅野ただのぶ dans le film. Cet endroit est filmé à plusieurs reprises. C’est à mon avis un des endroits les plus fascinants de Tôkyô : avec un peu de chance, on peut parfois y voir sortir des trains de toute part, j’en ai déjà vu 4 d’un coup… sur le pont et dans les 2 tunnels… Fascinant… Ôchanomizu,御茶ノ水)
Pour certains (les plus nombreux, certainement, et je les comprends totalement), ce qui compte, c’est vivre au Japon. Pour moi, c’est aussi ne plus être face à cet écran stupide, tous les jours durant 7 heures, ces mails qui ne me concernent pas, ne m’intéressent pas… Mes étudiants sont tellement humains, eux… Je fais rire mes collègues quand je dis de tel ou tel étudiant, Oh, il est pas méchant, oh, il est drôle…, mais c’est que je le pense vraiment !
(devant le musée des Transports, dimanche soir. On prend une dernière photo avant fermeture. L’an prochain, rendez vous à Saitama,埼玉市)
La vie de bureau est si triste, si répétitive. Alors, cet aspect vivant, quoi que absoluement déstabilisant pas la violence du rythme (ces trois jours non stop, cette promiscuité dans la salle des professeurs), j’aime bien. Enseigner le français, je trouve ça intéressant, d’autant que cela se double d’une demande de civilisation, de « Versailles » en « Tour Eiffel ». De Paris. Nous sommes aussi une part de rêve et j’aime particulièrement cette France abstraite, cette France de l’histoire et des grands gestes universels, cette France de l’art et de l’architecture, des grands écrivains et du cinéma d’auteur, de la gastronomie et de la nature fertile, généreuse, abondante de fruits et paysages, de saveurs et d’odeurs. La simple évocation d’un filet d’huile d’olive sur une petite salade de tomate évoque quelque chose de profond chez certains étudiants. Alors je suis heureux d’être ici, je me sens utile et je me donne des raisons de progresser. Peut être dans un an ou deux j’aurai une bonne idée de ce qu’est le Français Langue Étrangère et je pourrai me diplômer, je ne sais pas.
(La devanture du musée du transport public à Akihabara face à la rivière, illuminée. Bientôt la fin. Beaucoup de monde, et moi et moi et moi… Je passais par là, j’ai vu de la lumière…)
Je suis content, vous êtes de moins en moins nombreux à lire mon blog. Formidable ! Je me sens plus libre, j’ai moins de pression. Pour tout dire, je suis lassé de « parler du Japon ». Je ne désire parler que de ma vie. Des crêpes que je fais de temps en temps, à la bière, les crêpes, et avec du beurre et du lait entier, les crêpes, et avec du Nutella, les crêpes. Ou mes superbes rizottos « à la japonaise », c’est à dire en ajustant le goût par une pointe d’huile de césame, d’ail, de champignon longs et fins dont j’ignore le nom. De mes retours à la maison, à pied, cette foule aglutinée autours du musée du transport public , 交通物間 à Akihabara, 秋葉原 et qui vit ses derniers jours, tous prenant des photos… Ah, incorrigibles Japonais, toujours à aller dans le sens du vent, il faut avoir de la nostalgie pour cet endroit qui ferme, bien-sûr, la TV en parlé… Alors moi aussi, j’ai pris mes photos… C’est si agréable, faire comme tout le monde…
(cette vue m’a toujours plu. Le musée va partir et je devine déjà la suite. Le quartier de Akihabara change très vite, des tours désormais s’y dresse. Il faudra nourrir cette middle class aisée, la faire sortir et, comme vers la gare de Tôkyô, on installera donc à cet effet des restaurants sous la voie ferrée. Les pays sont différents, mais les nouvelles classes moyennes recherchent le même mode de vie fait de musique douce et de lumière tamisée, si possible à côté d’une rivière…)
J’en ai marre de parler du Japon parce que j’y vis, en fait, et parce qu’il y a des sites qui font ça très bien. J’ai envie de parler de moi et de ce que je vois, de ce que je mange et de ce que je lis. Je suis sûr que mes fidèles lecteurs préfèreront aussi et que les amoureux du Japon qui ne peuvent y vivre partageront ainsi avec moi mon quotidien… Moi, en tout cas, j’y prendrais plus de plaisir. Na !
Bon, allez, je suis gentil j’ai quand même mis des photos de Tôkyô. C’est normal, c’est ma ville ! Et je ne vous ai toujours pas parlé de l’affaire Clearstream, génial, non ?
Allez, de Tôkyô, avant le razage et avec rien à dire si ce n’est qu’il fait, à peu près, beau,
pressé,
Suppaiku
Laisser un commentaire