Deux ans, c’est long, c’est court…

Souvenons nous l’arrogante insolence du p’tit merdeux de l’Elysée ª au soir du premier tour, et nous apercevons son vrai visage, celui d’un véritable p’tit merdeux…

J’avoue, l’actualité et les informations ont un caractère incroyablement toxique que les réseaux sociaux amplifient de façon illimitée et j’ai une très forte envie de me sortir la tête de cette pression totalement inutile où je me sens entrainé malgré moi.
Je vis au Japon, et je ne crois pas que le séisme de 2011 ou l’accident de Fukushima ait perturbé de façon significative votre quotidien. Le mien, si. Bien sûr. Et c’est très bien que votre quotidien n’ait pas été perturbé parce que ce n’était pas votre vie, pas votre quotidien. Alors j’essaie de recréer cette distance que les réseaux sociaux abolissent.

Les tensions en France m’atteignent d’un point de vue moral, d’un point de vue politique; rien que voir hier encore des pompiers tabassés m’a révolté, hein, des pompiers…, mais le plus surréaliste est qu’elles n’affectent en rien mon quotidien. Ici, c’est calme… C’est cette distance que je dois recréer et qui va me permettre de penser ce qui se passe en France pour éventuellement pouvoir aider utilement et ne pas concourir au bruit ambiant.
Après tout, Marx parlait de pays où il ne résidait pas, et je pense que cette distance lui a permis de mieux penser que s’il y avait été car il était loin de l’urgence. La contingence est un ennemi mortel de la pensée, et c’est cela, le piège des réseaux sociaux, ils démultiplient les bavardages en nous éloignant du temps long dans laquelle le moment présent prend place et dont il n’est finalement qu’un tout petit aspect, cause et conséquence à la fois.

La situation dans laquelle nous sommes

À 10.000 kilomètres, donc. Plus que jamais, nous avons besoin de penser le réel sans plier à la contingence car c’est exactement le jeu de la coalition bourgeoise réunie autours du p’tit merdeux de l’Elysée ª.

Pendant qu’on ne parle que des retraites et que « de nouvelles formes de mobilisations inédites » se développent, le gouvernement gouverne et non seulement il amenuise chaque jour un peu plus les espaces de liberté mais il fait également passer une multitude de lois dans l’indifférence consternante de l’opinion, par exemple la loi Lagleize qui reconstituera avec le temps une classe de propriétaires fonciers à qui on devra louer le terrain de sa maison comme avant la révolution, des réformes de la justices qui amenuisent les droits de la défense, un flicage de l’internet qui étend les prérogatives de la police qui pourra censurer les sites sans juge ni aucune justification…

Le p’tit merdeux de l’Elysée ª a recours à des techniques qui sont celles d’un gouvernement fasciste de facture post-moderne, au véritable sens du terme, puisqu’il s’agit de dissoudre toute opposition, toute manifestation de la société au seul argument qu’il a été élu et que maintenant il peut faire ce qu’il veut, le tout en dépassant tous les niveaux de propagande et de distorsion de la réalité, au delà de tout ce que l’on pouvait imaginer.
C’est lHyperNormalisation, explique Adam Curtis dans son dernier documentaire pour la BBC, quand un pouvoir a tellement tordu la réalité qu’il se surprend à croire à ses propres mensonges (en lien, documentaire sous-titré en français).

On est bel et bien en république, il n’a pas encore fait de coup d’état comme peut éventuellement le lui autoriser l’article 16 de la 5ème république, mais ce n’est pas la démocratie. Et nulle doute que Marine Le Pen saura se souvenir des nouvelles limites autoritaires définies par le p’tit merdeux de l’Élysée pour se faire obéir.

Deux ans pour échapper à ce tandem monstrueux

Hélas, on n’y échappera pas en collant à l’agenda gouvernemental ni en cherchant à créer une quelconque « union à gauche ». C’est mort, tout ça. C’est fini.

J’ose l’écrire ici, et ça me pèse, mais bon, c’est mon blog et je ne peux pas vous mentir, et puis de toute façon je ne pèse pas grand chose, alors, pourquoi dissimuler mon sentiment, hein… Je m’en excuse d’avance pour toutes celles et tous ceux qui sont en lutte et aux côtés desquels je serais si j’étais en France, mais je pense que ces grèves ne mèneront nulle part, pas plus que le mouvement des gilets jaunes n’avait mené quelque part, parce que ce gouvernement, aidé par les médias et une police réduite à une milice au seul service de la coalition bourgeoise s’emploieront à nous briser en divisant la population.
Le gouvernement me fait penser à un gamin capricieux qui voudrait faire rentrer un cube carré dans un moule rond, et qui taperait, taperait, taperait en se mettant en colère, la face congestionnée par l’incapacité cognitive à reconnaitre son erreur, et nulle doute qu’il pourrait finir par y arriver, mais à quel prix…

Un prix humain incroyable, nos mutilés, nos éborgnés, tous ces corps meurtris et humiliés, leur dignité piétinée, leur humanité niée et bafouée par l’arrogance d’un pouvoir corrompu et abject.
Mais également le prix du discrédit pour un gouvernement dont la crétinerie n’a d’égale que la violence qu’il déploie et les mensonges dont il use et abuse.

Combien parmi nous désormais délaissent les médias trop complaisant, genre cette triple chiasse de Léa Salamé, qui d’un côté déroulent le tapis rouge au grand délinquant fugitif Carlos Ghosn, et de l’autre insultent des syndicalistes ou de simples citoyen en grève, ou encore organisent des « débats » où on ne parle de rien en s’engueulant et où de pseudo-journalistes se mettent en scène comme des sorte de Fouquet-Tinville de bazar, « que la police leur tire dessus! », « vous ruinez l’économie », « oui, je suis contre l’Islam », tout ça en défendant le « courage » et « les bons résultats du gouvernement »… et combien se retrouvent à finalement regarder les débats bien plus sérieux de Russia Today ou Al Jazeira, réalisez où on en est rendus

On ne les croit plus, le lien est cassé

Alors allons-y. Ça fait des mois que je pense que ces grèves ne mènent nulle part, je l’avais écrit en filigrane en évoquant Stuart Hall et la grève des mineurs quand il analysait les fractures de la société face à un gouvernement de guerre sociale, alors désormais je dois l’écrire. Mais ça ne veut en rien dire que si je considère que cette grève mène nulle part cela revient a dire que je m’en désolidarise ni que nous sommes vaincus. Cette grève, il faut la faire, c’est une question de dignité politique au sens où la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ainsi que le préambule de la constitution de 1946 les définissent.
« (La Nation) garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. » (article 11, préambule de la Constitution de 1946 repris dans la Constitution de 1958)
« Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l’action syndicale et adhérer au syndicat de son choix. » (article 6, préambule de la Constitution de 1946 repris dans la Constitution de 1958)

En fait, pour moi, ce n’est pas l’issue de cette grève qui conditionne la victoire, c’est la grève elle-même qui est une victoire, tout comme les gilets jaunes ont eux-même été une victoire dans un pays que l’on pensait anesthésié. Nous ne sommes pas l’Angleterre de 1984. Cette grève est le signe que le consensus né dans les années 80 autours de la globalisation et de la dérégulation est en crise.

L’idée selon laquelle nos institutions sont dépassées est désormais une opinion dominante, la population discute, se sent impliquée en même temps car elle se sent dépossédée, écrasée par un pouvoir qui ne doit son élection qu’aux conditions troubles du deuxième tour.

Un p’tit merdeux ª à l’Élysée

Souvenons nous l’arrogante insolence du p’tit merdeux de l’Elysée ª au soir du premier tour.
En 2002, lors de la soirée de premier tour, alors que chez Jospin une armoire normande venait de tomber sur la gueule des socialistes éliminés par Jean-Marie Le Pen, et que chez Chirac on avait un peu la gueule d’un chat qui s’est reçu une bassine d’eau froide sur la tronche.
Mais en 2017, chez le p’tit merdeux ª, c’était la fête, ça jubilait parce que cette bande de batards savaient qu’ils pouvaient compter sur la peur à gauche d’une victoire du FN bref, en réalité, la vraie soirée de victoire, chez le p’tit merdeux ª, ce n’est pas le second tour, c’est le soir de premier tour, c’est pour ça que ça y a été en p’tits fours, canapés et champagne à La Rotonde, et ce soir là, nous apercevons son vrai visage, celui d’un véritable p’tit merdeux ª.

Le grand machin du deuxième tour au Louvre n’était finalement qu’un emballage mensonger comme tout ce que fait cette bande de salopards, une vague copie sans aucun talent de Mitterrand en 1981, genre un type qui marche tout seul parce qu’il s’est fait tout seul bla-bla-bla, c’te blague, de la pompe républicaine prétentieuse filmée devant une foule triée sur le volet venue subir un spectacle au moins aussi ringard que la bande de cons qu’ils venaient d’élire et admirer le p’tit merdeux fraîchement élu tenant la main de sa peroxydée habillée en sape moche Bernard Arnault (code bourse, FR0000121014), ouf, on aurait pu avoir Marine le Pen, et sa femme, quelle élégance…

Depuis, on a eu Benalla paradant le premier mai vers le Jardin des Plantes et tabassant illégalement place de la Contrescarpe, une sorte de message subliminal pour dire à la police « allez-y les gars, c’est comme ça qu’il faut s’y prendre », message reçu cinq sur cinq, et puis ses 5 passeports, le port d’arme illégal, ses liens avec un oligarque russe et des versements d’argent non déclarés et illégaux, une visite à son domicile qui fait passer la police pour des Charlot avec le coffre qui disparait, « ben zut, alors », le type se ballade toujours en toute liberté à la Ghosn et sort un bouquin tranquillement, de toute façon il est couvert par le p’tit merdeux ª de l’Élysée et sa bande. Allez, vous pouvez re-visionner la soirée du premier tour, elle aura un goût encore plus indigeste, un goût de caca.

De nouveau, les idées circulent, le pays revit

La France est traversée par plus qu’une grève, elle mute, elle change, elle est brassée en profondeur et la déconnection d’avec le pouvoir, les grands capitalistes et les institutions n’en est que plus béante encore.
On a deux ans pour casser les fatalités qui pèsent sur la société, et peut-être est-ce cela le vrai fond, l’au delà de cette grève qui se cassera sur l’intransigeance du p’tit merdeux de l’Elysée ª. Elle est là, la plus grande de nos victoires. Dans cet au delà possible. Ce n’est donc plus d’un espoir qu’il s’agit, mais d’un horizon.
Voici ce que j’en pense, du « moment » que nous traversons.

Une fantastique fenêtre de tir politique devant nous

Le p’tit merdeux de l’Elysée ª

Il commet une erreur fondamentale, en bon crétin diplômé et suffisant.
La France n’est pas l’Angleterre de 1984, car pour déréguler le pays, à cette époque là, à mi-mandat, Thatcher avait besoin de casser les syndicats. Elle avait besoin d’une victoire idéologique dans un pays qui depuis 1945 vivait dans un consensus avec lequel elle entendait finir.
Elle voulait casser le consensus qui alliait le prolétariat ouvrier et la classe moyenne quand de son côté la bourgeoisie se contentait de vivre de ses rentes dans la paix sociale, pour aller vers un nouveau consensus qui allierait la classe moyenne à la bourgeoisie. Casser les grèves et les ouvriers d’un côté, privatiser de l’autre et faire de la classe moyenne de petits bourgeois propriétaires et boursicoteurs.

Thatcher aurait adoré les gilets jaunes, elle en aurait profité pour supprimer des taxes et des impôts en tapant sur « les syndicats »et « l’assistanat ».

Mais en 2020, la France est dors et déjà une économie dérégulée, « thatchérisée », privatisée en grande partie, où ce qu’il reste de la classe moyenne fait bloc avec la bourgeoisie, et cela depuis 30 ans, et la France en paie le prix fort à travers les bureaux de postes et les gares fermées en province, les centres villes déserts remplacés par ces entrepôts gigantesques aux sortir des villes, à travers des salaires qui n’augmentent plus et un chômage qui dépasse les 6 millions de personnes quand on applique les règles statistiques qui prévalaient jusque dans le milieu des années 80, quand il n’y en avait « que » 2 millions. La France ressemble déjà à l’Angleterre dans les grandes fractures territoriales et sociales qui la traversent après 40 ans de dérégulation.

Quasiment tout a été privatisé, et ce qui ne l’est pas est dors et déjà régi par les « règles du marché » en conformité avec les directives de la Commission Européenne et les choix des gouvernements successifs, en attendant leur privatisation.
Une caste d’énarques et d’inspecteurs général des finance, la plupart issus de l’aristocratie et de la très haute bourgeoisie, s’échange les places et le contrôle du capital des grandes entreprises qu’ils dépècent après la privatisation pour en tirer toujours plus de profit avant de devenir ministres, ou vice-versa.

Les grandes familles qui ont livré la France à Pétain ont reconstitué leur patrimoine, leur prestige et ont porté au pouvoir leur serviteur, le p’tit merdeux de l’Elysée ª.

François Asselineau et les « souverainistes » se trompent

Ils se trompent quand ils voient le « Frexit » comme « la » solution et qu’ils en font l’Alpha et l’Oméga. La France n’est pas le Royaume-Uni (décidément…), elle n’a jamais regardé l’Europe comme un ennemi, comme une construction douteuse qui allait la priver de quoi que soit.

Non, au contraire, l’Europe a même été un projet rêvé, embrassé par la France et par De Gaulle, notamment au sortir de la décolonisation, simplement parce que la France est un pays continental et que depuis Clovis, Charlemagne, puis le rêve Impérial des Capétiens et Napoléon, la France a régulièrement tenté l’aventure européenne comme moyen d’étendre son influence, et au temps de la guerre froide, la diplomatie européenne de la France correspondait exactement à cela.

Mieux, l’Europe a été un moyen de remplacer l’empire colonial perdu. De Gaulle, Giscard et Mitterrand ont donc été les bâtisseurs du projet européen, l’artisan de l’Acte Unique de 1985 et du traité de Maastricht était Jacques Delors, celui du traité constitutionnel était Valéry Giscard d’Estaing.

Alors oui, bien sûr, la réalité de l’Union Européenne et de l’euro n’est pas du tout ce qui avait nous avait été vendu et peut-être même il faudrait envisager d’en sortir, un débat qui ne devrait plus être tabou même et surtout chez les fédéralistes, au contraire, et cela surtout depuis le dépeçage de la Grèce où même les îles n’appartiennent plus à ce pays et ont été « privatisées » sous la pression de la Commission, ou quand on constate que désormais la dérégulation thatchérienne est devenue la règle de la politique européenne.

Mais rien ne fait du Frexit un Alpha et un Oméga simplement parce que l’Union Européenne était une utopie française.
Et puis, ce n’est pas l’Union européenne qui a dépecé le Royaume Uni, c’est Margaret Thatcher et ses amis, et cela bien avant que l’Europe ne dicte ses conditions. L’un de ses copains, James Goldsmith, dit « Jimmy Goldsmith », salopard boursicoteur « repreneur d’entreprises » et vaguement escroc qui a mis sur le carreau de centaines de milliers de travailleurs après avoir racheté leurs boîtes avant de les démanteler pour les revendre, est le fondateur du premier parti anti-EU au Royaume-Uni et a en France conduit en 1994 la première liste européenne « souverainiste ». François Asselineau hérite via sa proximité politique  avec Charles Pasqua des réseaux du bonhomme… (la page Wikipédia anglaise est bien plus complète que la misérable page française, utilisez Google pour traduire si vous ne maitrisez pas l’anglais).

J’écris ça, mais bon, je n’ai rien contre François Asselineau.

Quand à la droite et la gauche…

La droite, de son côté, est dans le choux, elle m’amuse depuis décembre dernier, car elle regarde Boris Johnson comme une possible clé de sa résurrection. C’est amusant, la droite, quand on sait que durant 40 ans elle s’est évertuée à torpiller le consensus « social » gaulliste pour devenir une championne de la dérégulation, et puis là, elle se rêve « sociale et conservatrice à la fois »…

Et parce que la France n’est pas le Royaume-Uni (ouf…), je complèterais par respect de la symétrie dans l’erreur en signalant que ni Jeremy Corbyn ni Tony Blair ne sont les clés d’une résurrection de la gauche car la France n’est pas le Royaume-Uni (re-ouf).

C’est mort, tout ça. Allez, je vous mets même un cadeau Bonux. Bernie Sanders n’est pas plus la solution, et Trump va être réélu magistralement pour exactement la même raison que la gauche a été balayée en Grande-Bretagne.

Marine Le Pen et le Rassemblement National

Voilà pourquoi Marine Le Pen est, pour le moment, la mieux placée pour sortir de cette mêlée.
Elle, elle ne va chercher son modèle nulle part, elle a reconstruit un parti en le calant sur la situation actuelle, sans renier les principes de base de son parti. Elle lui a même donné le nom idéal pour introduire l’idée d’une coalition anti-establishment.
Ils m’amusent, les têtards qui pensent qu’elle est idiote, leurs ancêtres disaient la même chose de Thatcher.

Elle est la seule à ne pas commettre d’erreur d’analyse sur le moment et à coller au temps présent. Un sans faute. Bien au contraire, les critiques et les politiques des uns et des autres trouvent en elle une sorte de synthèse, l’autoritarisme bonapartiste et les coups de menton du p’tit merdeux de l’Elysée ª, la LREM qui transforme l’Assemblée Nationale en serpillère alimente l’anti-parlementarisme, la critique incessante de l’Union Européenne de toute part, la fronde social, le rejet « des élites », le vomi intellectuel des chroniqueurs islamophobes-réactionnaires-souverainistes-consensuels Polony-Zemmour-Barbier ainsi que les gesticulations opportunistes des girouettes des anciens partis explosés en vol en 2017.

Écouter Ségolène Royal qui hier chantait les louanges du p’tit merdeux de l’Elysée ª et de la répression abjecte des lycéens de Mantes-la-Jolie devenir une farouche opposante au p’tit merdeux de l’Elysée ª dès lors qu’elle se fait virer d’un maroquin illustre assez bien le pathétique de la situation.

Une fois posé ce diagnostique, la situation est beaucoup plus claire.

Tout est fichu, on a perdu. C’est cuit.

Je veux dire par là, pour « nous autre ». Voilà pourquoi de gilets jaunes en mouvements sociaux nous sommes entrés dans un long, très long « hivers du mécontentement », « Winter of discontent », une grève sans issue, comme le UK en avait traversé une entre 1978 et 1979. La fin est actée, c’est maintenant, le vieux ne se meurt plus, il est mort, et le monstre est lâché, qu’il s’appelle Macron ou Le Pen.
Thatcher avait gagné par défaut, pas par adhésion. Le Labour était alors usé et avec lui le consensus de 1945, et toute la société l’était avec eux. Il suffit de regarder Orange Mécanique pour comprendre que le UK n’était plus une société très sûre d’elle-même.

Macron tente de reproduire la rupture thatchérienne sans comprendre qu’en réalité il est perçu comme le summum de l’establishment alors que Thatcher était avant tout perçue comme totalement anti-establishment, exactement comme Marine le Pen l’est.

Qu’est-ce que « l’Establishment », « l’Oligarchie » en 2020

La question n’est pas d’appartenir ou pas au dit establishment, c’est l’attitude que l’on aura vis-à-vis de l’establishment. Trump est un pur produit du capitalisme américain, de son establishment, mais il a tenu tête au ron-ron capitaliste, comme Thatcher autrefois et comme Johnson désormais: ainsi le Brexit n’était pas populaire dans les milieux de la finance, mais pour faire court Johnson leur a dit « bon ben les gars, on s’en fiche, va falloir s’y faire sinon les pouilleux vont voter pour les rouges et vous matraquer d’impôts pour financer leurs logements de merde ».
Message entendu 5 sur 5, et Johnson est allé de ce pas serrer les paluches de ce bon populo qu’il ignore et dont il ne voit que les profits qu’il pourra en tirer.

Trump, c’est un peu la même chose, « on a intérêt à faire ce que je vous dit de faire, sinon les nègres, les niakwé et les vendeurs de churros vont finir par élire un métèque qui va piquer dans nos caisses pour financer leur natalité galopante et remplir leurs frigos ». Message entendu 5 sur 5 et cette année, Wall Street plébiscitera Trump, d’autant que ce dernier pousse à des investissements massifs dans le pétrole non conventionnel. Drill, baby, drill!

Marine le Pen sera donc élue exactement comme Thatcher.

Par défaut. Et la bourgeoisie, passé le hola de dégout de se retrouver avec une meuf élue par des gens qui font leurs courses chez Lidl-Aldi-Leclerc-Carrefour-Leader Price en périphérie de villes, là, où il n’y a que les entrepôts moches et où on se rue sur des pots de Nutella, se réjouiront des nouvelles avancées fiscales qu’elle leur offrira. La thune n’a pas d’odeur.

Exactement comme Marine le Pen, Margaret Thatcher, c’était un populisme autoritaire (cf Stuart Hall), elle s’est imposée aux élites britanniques qui ne croyaient pas en elle, qui ne voulaient pas de sa politique parce que les élites préféraient toucher leurs rentes et ronronner tranquillement pour éviter les vagues.
Elle s’est imposée aux riches en s’appuyant sur la classe moyenne voire même sur une partie de la classe ouvrière à qui elle a promis une restauration de la grandeur britannique (Reagan aussi, et Trump aussi) et la « responsabilité » contre « l’assistance » et « l’étatisme ».

Ce sont les classes moyennes qui ont fait Thatcher (et Reagan, et Trump), pas la bourgeoisie britannique, même si bien sûr sa politique les a immensément enrichis. Trump, le Brexit, c’est exactement le même phénomène, ce sont les classes moyennes qui en ont voulu il y a 4 ans, et désormais les riches vont se joindre au mouvement parce ce changement de cap n’a pas nui à leurs intérêts, bien au contraire. C’est si bon, moins d’impôts. Les classes moyennes en rafollent jusqu’au jour où les frais universitaires sont multipliés par cent, où la bourse dégueule et où la gare ferme, mais bon, sur le moment, it’s so gooood. Les riches, eux, ils auront toujours un crédit à proposer pour l’université, des facilités de paiements pour rembourser les dettes après la chute de la bourse et un crédit auto pour remplacer le train. Avec les intérêts, placés aux Îles Caïman, ils s’achèteront une villa sur une île artificielle à Dubai ou vers la Nouvelle-Zélande. 

Alors quelle alternative

Je veux dire, pour la France, nous permettrait de vider Macron en évitant Le Pen? Quelle alternative nous permettrait de saisir le moment pour franchir un saut qualitatif aussi important que l’a été le création du consensus d’après-guerre dont nous percevons tous, malgré toutes les incantations sur le « programme du CNR », qu’il est mort parce que nous l’avons laissé mourir de façon hypocrite, à la française, sans le dire franchement, de baisses d’impôts en privatisations et tripatouillage des statistiques du chômage en lois liberticides.
La réponse est fort simple.

La réponse n’est pas sociale, elle est institutionnelle.

Depuis 2002, les forces « progressistes » ont été piégées par les institutions avec des deuxièmes tours qui les ont forcées à choisir entre la peste ou le choléra. Quand cela n’a pas été le cas, les institutions ont permis des présidences tentaculaires, qu’elles soient « bling-bling » ou « normale » et où le parlement s’est retrouvé réduit à n’être qu’une sorte de caisse enregistreuse sans même le décorum simili-démocratique des présidences des années 60-90.

Le quinquennat et l’inversion du calendrier électoral ont fait de la présidence le siège central et unique du pouvoir. Avec Emmanuel Macron, nous sommes face à un président choisi par 18% des électeurs au premier tour et élu par effraction au second tour, qui après avoir lancé un « qu’il viennent me chercher » semble gouverner en nous balançant en permanence à la figure, « j’m’en fout, vous voterez encore pour moi pour échapper à Le Pen au deuxième tour », inconscient du fait que non, nous ne voteront pas pour lui.

On restera à la maison, parce que personne ne vote pour se faire éborgner, être mis sous écoute, son site interdit de façon aléatoire sur dénonciation ou bien être interdit de manifester de manière « préventive » pendant que ses gamins sont mis « à genoux » et qu’un simple contrôle de police tourne au meurtre dans l’indifférence polie du ministre de l’intérieur malgré toutes les vidéos de cet assassinat.

On peut battre le p’tit merdeux d’l’Élysée et éviter Le Pen si nous revenons aux sources même de la critique de nos institutions, à leur genèse dans les guerres coloniales, au coup d’état qui les a vues naître, et le dire comme ça semble très bien résumer la situation où nous sommes, entre violences policières, racisme institutionnalisé et autoritarisme.

Balayer la 5ème république…

Pour les renverser comme nous y appelait Pierre Mendès-France en 1961 dans ce qui devrait devenir un livre fondateur, Pour la République Moderne. Et pour oser faire ce que Mendès-France n’avait pas voulu faire: prendre le pouvoir dans le cadre de la 5ème république pour sortir de la 5ème république, exactement comme De Gaulle a pris le pouvoir dans le cadre de la quatrième pour la détruire.
En refusant de le faire par honnêteté, Mendès a involontairement ouvert la voie à l’opportunisme de Mitterrand qui, lui, avait très bien compris la 5ème république.

La véritable trahison de Mitterrand n’est donc pas dans « le tournant de la rigueur de 1983 ». La véritable trahison de toute la gauche, communistes compris, c’est d’avoir passé à la trape le changement des institutions de la cinquième république en se calant sur l’agenda de Mitterrand, c’est d’avoir manqué à renverser une cinquième république née d’un putsch et d’avoir osé faire la fête le 10 mai 1981 en validant ces mêmes institutions dont nous mesurons aujourd’hui à quel point elles peuvent présenter un caractère profondément autoritaire, exactement comme l’écrivait Pierre Mendès-France.

Pire. Des institutions que nous avons re-validées comme des idiots en 2002 et en 2017 en « faisant barrage », annulant de fait le peu de démocratie qu’elles contiennent, ouvrant la voie irréversible vers leur pente totalitaire et dictatoriale.

Ce n’est pas la république, qui est menacée, et le danger n’est pas dans « l’hydre islamiste ». C’est la démocratie, pourtant en France déjà fort limitée, qui est menacée, et le danger, c’est la 5ème république.

C’est la cinquième république qui a permis de ne pas respecter le résultat du référendum sur le traité constitutionnel de 2005. C’est elle qui permet d’inscrire l’état d’urgence dans la loi et des descentes de polices sans supervision judiciaire. C’est elle qui permet de faire passer en coup de force des lois fondamentales comme celle sur les retraites. C’est elle qui a inspiré un truc aussi fondamentalement raciste et abject que « la déchéance de nationalité ».

Une République Nouvelle, Démocratique et Sociale

Pour battre le p’tit merdeux d’l’Élysée et éviter Le Pen, c’est à la constitution d’un front démocratique que nous devons travailler. Et par front démocratique, j’entends un front authentiquement démocratique, en rupture totale avec le rouleau compresseur républicain. Ouvert.

La présidentielle ne devra donc pas être une affaire de programme, mais être le point de convergence d’un point extrêmement simple: le président élu sera le dernier président de la cinquième république.
Il n’y aura pas de constituante, mais un vote direct de la nouvelle constitution une semaine après les législatives de juin 2022, avec entrée en vigueur au premier janvier 2023, parce que la 5ème république a été faite d’une telle manière qu’une constituante virerait au fiasco, et les médias s’y emploieraient. Il s’agit bel et bien d’un coup d’état de la démocratie contre des institutions autoritaires qui légalisent le dépeçage du peu de libertés consenties et traitent le peuple en ennemi.

Le texte de la constitution de la nouvelle république devra être prêt bien avant la campagne présidentielle pour devenir la plateforme de ralliement de tous ceux et toutes celles qui veulent rouvrir le champ politique en donnant un réel débouché à la crise politique majeure que nous traversons. Les individus, groupes et militants qui s’agrégeront dans ce front démocratique auront le temps de se définir idéologiquement pour fournir à cette coalition les contours de la futur majorité législative ainsi que leurs propres programmes politiques. Pourront ainsi naître de nouveaux partis politiques émergeant de l’expérience militante de ces dernières années, enracinés dans les luttes du quotidien, qui présenteront leurs candidats lors des élections législatives transitoires de juin 2022, puis des nouvelles élections législatives dans la nouvelle république et selon le nouveau mode de scrutin en juin 2023.

Je propose une option, je la mets là. Et je vais y travailler à travers des textes mais aussi une chaine YouTube. On a deux ans pour éviter une véritable catastrophe. Parce que nous sommes bel et bien en route vers une véritable catastrophe.

On vaut mieux que ça

Note:
ª Petit merdeux: (nom, masculin) jeune personne prétentieuse. Synonyme: blanc-bec.


Commentaires

2 réponses à “Deux ans, c’est long, c’est court…”

  1. Je suis d’ores et déjà avec vous.

  2. Je suis d’ores et déjà avec vous.

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